Économie Solidaire. Une nouvelle manière de penser l’économie

Dans le Traité sur le Feu Cosmique, il est écrit que : “La Loi gouverne entièrement la nature, et chaque partie du Tout est assujettie à certaines déterminations inhérentes, qui dirigent l’ordre de l’évolution. Il n’existe pas un atome qui ne soit sous l’influence de quelque grande loi” et que la loi fondamentale qui gouverne la substance est la Loi d’Économie. En étudiant ces Lois, l’humanité devrait pouvoir faire une utilisation plus intelligente (et en écoutant son cœur) et plus sage des forces de la nature, et ainsi parvenir à l’accomplissement du Bien commun et à l’émergence de la Nouvelle Civilisation qui se lève.

“Selon la Loi d’Économie, dans un monde équilibré, tout serait accordé et réparti avec justesse suivant le besoin réel assurant le fonctionnement de chacun. Lorsque la force du désir de l’individu accapare, par violation mentale (plus ou moins importante), ce qui ne vient pas à lui, ce dernier détourne de son but véritable ce qui ne lui était pas destiné, lésant ainsi l’ensemble des autres individus. Ce qui existe dans l’univers objectivé est délimité dans sa quantité. Il n’y a pas d’extension à ce niveau. Donc, le fait de désirer et obtenir davantage… quel que soit le genre : matériel, émotionnel, affectif, etc., est une appropriation illicite (spirituellement parlant).” [1]

L’action entraîne la réaction et c’est là que joue le karma de l’homme centré dans la forme. Ce qui est vrai dans le sens de “choc en retour” ou karma de Rétribution, l’est également dans le sens de l’action positive, ou Karma “récompense”.

En examinant la gestion des pensées, des paroles et des ressources humaines, on peut se rendre compte, que l’humanité a accumulé un énorme karma “négatif” depuis des temps très reculés, et qu’il serait peut-être l’heure ou le moment opportun pour renverser cette tendance. Ces derniers siècles, malgré une accentuation du pillage des ressources terrestres, la terrible destruction de la faune et de la flore, de l’instauration d’une société de surconsommation d’un côté du globe, l’appauvrissement et l’exploitation de l’autre côté, ainsi que la manipulation des masses par les médias, jeux et tutti quanti, nous voyons cependant germer ici et là des idées de partage et d’équité, d’éthique. La mise en pratique de ces Idées à travers l’Économie solidaire sont encore parsemées, leurs débuts lents et souvent passés sous silence, ou bien contrés par les forces adverses, elles sont toutefois un signe d’espérance d’un avenir meilleur et cette nouvelle prise de conscience et tendance croît sans cesse.

[2] “Le terme d’économie solidaire est utilisé pour désigner des pratiques très différentes comme le commerce équitable, la finance éthique, le microcrédit, le tourisme solidaire, l’agriculture durable, les réseaux d’échange de savoirs, les services de proximité, les régies de quartier, les différentes formes entrepreneuriales collectives. Cette grande diversité rend difficile le travail de définition et de délimitation du concept qui la recouvre. Par ailleurs, l’économie solidaire est souvent associée à l’économie sociale, qui renvoie à des réalités plus précises et mieux délimitées, mais dont l’identité se dilue également dès qu’elle est intégrée à l’économie solidaire. Nous commencerons donc par préciser la notion d’économie sociale, pour identifier ensuite celle d’économie solidaire et établir enfin le lien avec le développement durable.

L’économie sociale désigne en général les activités économiques réalisées par des personnes privées mais poursuivant un intérêt collectif. C’est en ce sens qu’on parle souvent du “tiers-secteur”, car il se distingue du secteur public, mais également du secteur privé, qui recherche avant tout la maximisation du profit, c’est-à-dire une rentabilité aussi élevée que possible des fonds investis. L’économie sociale comprend donc les entreprises et organisations qui combinent des modes de création (production, commerce, finance) et de gestion privés mais collectifs (de type associatif), avec des finalités non centrées sur le profit. Ces modes particuliers de création et de gestion se sont traduits dans des formes juridiques spécifiques : les coopératives, les mutuelles et les associations. L’économie sociale est ainsi définie surtout par le statut juridique de ses acteurs.

L’émergence de l’économie sociale s’inscrit dans une longue histoire sociale et intellectuelle, marquée par les apports et les réflexions, d’un grand nombre de personnes et par la mise en place de différents types d’initiatives, depuis 1760.

La notion d’économie solidaire est bien plus récente que celle d’économie sociale, et son contour bien plus imprécis, même si l’on associe souvent les deux termes en une seule expression, celle d’ “économie sociale et solidaire”. L’idée d’une économie solidaire est largement revendiquée par le mouvement “altermondialiste” qui se retrouve depuis 2001 autour du Forum Social Mondial. La recherche d’une “autre mondialisation” va de pair avec celle d’une “autre économie”, pensée tantôt à l’intérieur du marché, tantôt comme une économie parallèle. L’économie solidaire désigne cette autre économie que l’on voudrait au service de l’intérêt collectif et de l’utilité sociale plutôt que de l’intérêt individuel. Or cet intérêt collectif se décline à travers des objectifs bien plus variés que ceux visés par l’économie sociale, notamment à son origine, au XIXe siècle. Ces objectifs vont être exprimés en termes de solidarités nouvelles : solidarité envers les générations futures, ce qui conduit à introduire la dimension environnementale dans les objectifs poursuivis ; solidarité entre personnes d’âge et de sexe différents ; solidarité entre territoires ; solidarité entre Nord et Sud ; solidarité entre proches et vis-à-vis des plus démunis. Ces solidarités multiples vont se traduire par des pratiques dans des domaines très différents : la production, la consommation, la finance, le commerce international, les services à la personne, l’insertion sociale, le développement local, le secteur culturel. Et les différences se multiplient encore à l’intérieur de chacun de ces domaines : ainsi, dans le secteur financier, on va retrouver les tontines africaines, le microcrédit et la Grameen Bank, les fonds de partage comme ceux des Cigales, les placements éthiques et durables.

Qu’est-ce qui fait alors l’unité de toutes ces pratiques si différentes ? La finalité de l’économie. Deux dimensions paraissent associées à l’activité économique dans toutes ces pratiques, qui se situent au niveau de leur finalité plutôt qu’au niveau de leur forme juridique ou institutionnelle, comme dans l’économie sociale. Il s’agit, d’une part, de la dimension sociale, exprimée par la recherche des rapports sociaux de solidarité et la création d’un lien social non marchand, et d’autre part, de la dimension politique, exprimée par la volonté d’un agir démocratique et la création d’espaces de débat public. […]. Cette recherche d’articulation du social et du politique dans l’activité économique va interroger le fondement même de l’économie, sa nature, sa logique et son rôle dans la constitution de la société. L’économie apparaît ainsi avec une finalité de médiation sociale avant celle de médiation matérielle : l’allocation des ressources devient un moyen pour créer des relations sociales plutôt qu’une fin en soi. Le vivre ensemble et le projet de société deviennent des objectifs économiques au même titre que la création de richesse matérielle.

S’agit-il d’une deuxième nature de l’économie ou du retour à sa nature première ? Il faut ici rappeler que l’idée de marché est apparue au XVIIIe siècle comme une manière nouvelle de penser la constitution et la régulation du social avant d’être appréhendée comme un mécanisme économique de détermination des prix par l’offre et la demande (Rosanvallon, 1989). L’économie de marché est bien une construction sociale et politique de la modernité plutôt que le résultat d’une évolution naturelle, liée au penchant de l’homme à l’échange (Polanyi, 1944 ; Caillé, 2005). En ce sens, l’économie solidaire n’introduit pas une nouvelle “externalité” à l’économie, mais elle renvoie à son essence première.

Économie solidaire et développement durable

Le développement durable introduit une nouveauté radicale dans la manière de penser “le vivre ensemble” : la prise de conscience du caractère non durable du mode de développement actuel et le risque grave que sa poursuite ferait courir à la vie des générations futures. Cette non-durabilité est d’abord associée à l’épuisement et la dégradation des ressources naturelles. Mais la protection de l’environnement naturel pose très vite des questions fondamentales sur notre manière de produire, de consommer, d’habiter l’espace, de vivre en société. Ces questions interrogent profondément notre mode de développement économique, politique et social, et invitent à repenser d’une manière radicalement nouvelle notre projet de société. Ce qui est profondément en cause avec le développement durable, c’est notre vivre ensemble plutôt que les techniques utilisées pour gérer les ressources naturelles. Le développement durable constitue ainsi une chance pour repenser nos modes de développement, sur la base, d’une part, d’une nouvelle relation entre l’homme et la nature, et d’autre part, d’une nouvelle cohérence entre les dimensions économique, politique et sociale.

En ce sens, l’économie solidaire s’inscrit totalement à l’intérieur d’une démarche de développement durable, car elle vise justement à créer une articulation nouvelle entre l’activité économique et des objectifs de création de lien social et d’agir démocratique. Cependant, le développement durable est très souvent réduit à sa seule dimension environnementale et risque ainsi d’être abordé seulement comme un problème technique de gestion de ressources naturelles, relevant surtout de la recherche scientifique et du changement de quelques habitudes quotidiennes dans l’utilisation de ces ressources (être attentif dans l’utilisation de l’eau, du chauffage, de la voiture, etc.). Or, toutes les solutions environnementales aujourd’hui envisagées ont des conséquences, souvent perverses, en termes économiques, sociaux et politiques. Prenons juste un exemple : le recours aux agro-carburants comme une alternative au pétrole pour faire fonctionner les voitures peut avoir des effets très nocifs. D’une part, les cultures à vocation énergétique devront se faire au détriment des cultures destinées à l’alimentation. Ensuite, leur commercialisation déstabilise les marchés agricoles, comme il est déjà arrivé pour le maïs au Mexique, suite aux déclarations du président Bush prônant un développement rapide de l’éthanol. Enfin, leur production à grande échelle entraîne d’autres dégâts environnementaux : déforestation pour récupérer des surfaces de culture, grande consommation d’eau et appauvrissement des sols si l’on utilise des produits chimiques pour augmenter la productivité. L’application de toute solution technique relèvera d’un choix de société qui devra nécessairement intégrer la dimension économique, politique et sociale. En ce sens, l’économie solidaire apparaît totalement imbriquée au développement durable. Par ailleurs, le développement durable est fondé sur le principe de solidarité : solidarité dans le temps, c’est-à-dire avec les générations futures, et solidarité dans l’espace, c’est-à-dire avec toutes les populations de la planète, notamment les plus pauvres. On peut donc, autour de ce principe, rassembler le développement durable et l’économie solidaire. Il ne faut pourtant pas réduire la solidarité à l’assistance envers ceux qui sont dans le besoin, autrement dit la limiter à combler des manques. La solidarité mobilisée à travers le développement durable et l’économie solidaire vise plutôt le partenariat que l’assistance, le développement de potentialités plutôt que la réponse aux besoins, la création plutôt que la redistribution. Elle se traduit en termes d’alliance autour d’un projet commun ; elle s’imagine moins en termes de préservation ou sauvegarde de l’acquis qu’en fonction d’un nouveau possible, d’un avenir différent et meilleur. Le développement durable et l’économie solidaire s’inscrivent alors dans un même objectif, celui de penser un mode de développement “intégral”, à savoir qui intègre tous les êtres humains, présents et à venir, mais aussi, la totalité des capacités humaines, actuelles et encore inconnues.

Nous sommes dans un “temps favorable” pour faire émerger du radicalement nouveau …aujourd’hui c’est le “temps favorable” pour rendre l’existence plus humaine, et l’économie fait partie de cette aventure passionnante.”[3]

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Le projet de la nouvelle Culture prépare un patrimoine commun pour tous les hommes.

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Note : Cet article est publié alors que le Soleil apparent transite Le 3ème secteur de la Balance, vecteur du 3è

[1]. “Un Chemin de Lumière” p.78 Giuseppe Filipponio

[2].  L’Économie solidaire : une manière nouvelle de penser l’économie  Elena Lasidahttp://www.encyclopedie-dd.org/IMG/pdf_No63Lasida.pdf  .

[3].  Elena Lasida est sociologue, Professeur à l’Institut catholique de Paris, vice Doyenne à la recherche et directeur du 3ème cycle à l’Institut catholique de Paris. Elle est Docteur en Sciences Sociales et Économiques.

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