La Lumière de la Connaissance

Traduit de l’article de Giuliana P.

Dans le langage courant, les termes ‘connaissance’, ‘savoir’ et ‘sagesse’ sont souvent utilisés comme synonymes, perdant ainsi la différence subtile mais significative qui les distingue.

En suivant les suggestions qui nous viennent de l’étymologie (1) de ces mots, nous découvrons que la ‘connaissance’ est la compréhension des faits obtenus par l’expérience et la réflexion qui en découle ; le ‘savoir’ rappelle l’idée d’avoir goût et odeur, et est donc liée au ’jus’, au distillat de la connaissance ; la ‘sagesse’ , enfin, étroitement liée au savoir par la dérivation étymologique, serait surtout informée par les concepts d’intelligence et de lumière, et serait l’application juste et aimante de la sagesse.

Le Lambdoma de l’Espace  explique ainsi les deux définitions : La Savoir est l’intelligence divine de l’Amour (3.7), la Sagesse est l’expression dorée de l’Amour (5.7) ; la lumière est donc cet élément capable de rendre claire, manifeste et évidente toute tentative de connaître la Réalité, tandis que l‘Amour, auquel s’inclinent également le savoir et la sagesse, devrait être le motif, et le but, de toute quête intellectuelle.

La sagesse se présente donc comme l’étape finale du parcours cognitif humain : la vision lucide de la Réalité que l’intellect, mû et nourri par l’Amour, a pu conquérir sur son chemin est transfigurée dans la lumière encore plus éblouissante de la sagesse où les contraires sont finalement recomposés dans l’unité et où la Réalité apparaît pour ce qu’elle est essentiellement, la Vérité.

Mais nous vivons une époque chaotique et dispersive, une époque où la recherche du sens est submergée par la marée étouffante de minuscules fragments de sens et de vérité que l’on prend pour l’Absolu.

Les mots, les nouvelles, les événements, les significations, les explications, les interprétations se chassent les uns les autres, se chevauchent, se nient ou s’affirment les uns les autres dans un fatras de plus en plus chargé de confusion et de la prétention illusoire à la Vérité qui en découle ; tout ce mouvement décousu entrave le « calme dynamique » intérieur qui caractérise la tension vers la connaissance.

 (… ) Elle comprend toute connaissance familière à l’homme qu’il accepte sur les dires d’autrui, et aux spécialistes des diverses branches de la connaissance. Elle se fonde sur des informations dignes de foi et implique la confiance dans les auteurs, les orateurs, l’intelligence experte des spécialistes de l’un ou l’autre des divers domaines de la pensée. Les vérités acceptées comme telles ne sont ni formulées ni vérifiées par qui les adopte, car la formation et l’équipement lui font défaut.  Traité sur la Magie Blanche p. 14

La seconde est la Connaissance avec discernement. Elle a une qualité sélective et implique un jugement intelligent, l’application pratique d’une méthode plus spécifiquement scientifique, l’expérimentation l’élimination de ce qui ne peut être prouvé, et la sélection des facteurs qui peuvent être soumis à l’examen et qui sont conformes à ce que nous entendons par loi.. … Ce processus scientifique de discernement a permis à l’homme la conquête de nombreuses vérités concernant les trois mondes. (…) Ce qui conduit inévitablement à l’émergence du troisième degré de la connaissance, la Connaissance intuitive. L’intuition n’est en réalité que la perception par le mental de certains facteurs dans la création, de lois de la manifestation ou de quelque aspect de la vérité, connu de l’âme, émanant du monde des idées et étant de la nature des énergies génératrices de tout ce qui est connu et vu. Ces vérités toujours présentes et ces lois toujours agissantes ne peuvent être identifiées que par un mental développé, concentré et ouvert. Plus tard vient la compréhension et, finalement, l’application aux besoins et aux nécessités du cycle de l’époque”. (2)

La connaissance n’est donc pas une fin en soi, elle ne doit pas être utilisée pour le simple développement individuel, mais, et c’est là un point essentiel, elle est le véhicule de l’Amour et de la Volonté, elle doit être utilisée pour développer pleinement la faculté de l’amour actif et intelligent.

La véritable pensée créatrice, et la connaissance qui en découle, est une pensée abstraite et intuitive, c’est la lumière de l’Intelligence mise en avant par l’Amour, c’est la synthèse entre l’Intelligence et l’Amour, entre un esprit aimant et un cœur pensant.

À l’opposé de la connaissance, il y a l’ignorance, ce qui nous ramène à Platon, au Mythe de la caverne, à la théorie des Idées et de la connaissance (3) puisque l’intelligence humaine, dit Platon, doit s’exercer à se tourner vers l’Idée, vers l’Unité qui est saisie par l’esprit abstrait, tandis que la multiplicité des sensations du monde formel est passée au crible, et connue, par le mental concret.

Nous sommes donc invités à développer pleinement, non seulement en tant qu’individus, mais en tant qu’humanité, notre capacité cognitive afin que le monde qui nous entoure prenne tout son sens et nous incite à faire le pas suivant, celui qui nous projette dans les mondes subtils où résident les sources de chaque signification.

Sur ce chemin, nous sommes aidés, selon le rythme et les cycles /la cyclicité, par les rencontres enflammées des Luminaires qui inondent l’Espace de leurs rayons d’énergie.

Aujourd’hui, pour la vision héliocentrique, Mercure et Uranus se rencontrent dans la substance ardente du Taureau, libérant cette Lumière claire et nette qui est le véhicule de toutes les connaissances possibles.

Le Signe du Taureau, relié à la 3ème Hiérarchie non-manifestée, « La Lumière par la connaissance »(4), offre le fond lumineux sur lequel les deux Luminaires peuvent à leur tour projeter leurs propres lumières ; l’action perturbatrice et façonnante  de Vulcain, Régent ésotérique et hiérarchique du Signe, insiste sur la substance mentale, en allumant le Feu de la compréhension et en accordant prévoyance et discernement.

Grâce à ces deux ailes, le mental peut s’élever dans la spirale cognitive et entrer dans le royaume de la Sagesse.

Mercure, véhicule ailé du 4ème Rayon, élève les esprits, par la puissance de son mouvement accéléré, jusqu’à la lumière du Soleil dans laquelle ils sont rendus semblables à cette radiance et accèdent alors, sans intermédiaire, à la connaissance directe de la Réalité.

Uranus, qui porte en lui la puissance du 7ème Rayon, voit et gouverne des horizons inviolés en vertu de sa position « étrangère » et, fort de cette connaissance « occulte », il pousse les esprits à construire une nouvelle civilisation fondée sur la Fraternité et visant le Bien Commun.

L’Intelligence Suprême, éclairée par la lumière du Cœur Parfait, peut alors pénétrer les mailles de l’Être et conduire l’Humanité à connaître et à attester son destin de créateur lumineux.

 “Le Cœur Parfait peut exprimer toutes les potentialités de la nature à un tel point que
n’importe quelle forme peut prendre vie.
Le Cœur Parfait contient toutes les manifestations naissantes des forces créatrices.
 La Raison Absolue, de laquelle l’humanité tire l’essence de ses efforts
affirme les manifestations créatrices avec sollicitude.
L’œuvre constructive des énergies cosmiques est dirigée par le Cœur Parfait
La durée de l’action dans le Cosmos s’appelle perpétuité.
Pourquoi n’est-il pas possible, dès lors, d’appliquer ce concept à l’énergie qui pousse l’esprit vers des sphères supérieures ?
Alors que des efforts sont effectués pour affiner même la vie
 végétale, pourquoi ne pas en faire de même envers l’humanité ?
Le Cœur Parfait tend toutes ses énergies pour cette ascension.

Le Feu Cosmique est en éternel mouvement,
 orienté par la Raison Absolue et le Cœur Parfait”. (5)

Notes

  • Le terme « connaissance » dérive du latin tardif cognoscentia, dérivé de cognoscere et constitué de la particule latine cum accolée au mot grec ancien gnòsis (connaissance) ; les termes « sagesse » et « sage » dérivent tous deux, selon la plupart des chercheurs, de la racine indo-européenne *SAP-, liée à l’idée d’essence/goût/jus/senno, tandis que pour certains la racine originelle serait *SAK-, exprimant l’idée d’écoulement. Rendich, enfin, propose pour le grec sofòs et le latin sapiens, sage, la racine indo-européenne bhās, qui exprime le concept d' »effet [ā] d’un déplacement [h] d’énergie [b], “briller”, “être lumineux”. (Pour plus de détails, voir TPS, Glossaire)
  • Bailey, Traité sur la Magie Blanche, ang. 14-16
  • Socrate avait souligné l’importance conceptuelle de la connaissance universelle et nécessaire, et Platon insiste sur le fait que cette connaissance présuppose des modèles permanents, intellectuels et non sensibles. Selon Platon, les choses mouvantes et sensibles ne sont rien en elles-mêmes, elles ne possèdent l’être que dans la mesure où elles reflètent de manière multiple, participent de manière imparfaite ou illustrent une Idée (Eidos). Les choses que nous saisissons avec nos yeux physiques sont des formes physiques, celles que nous saisissons avec l’œil de l’âme, c’est-à-dire avec l’intelligence, sont des formes non physiques, intelligibles, des essences pures (Idées). La particularité des Idées est donc de ne pouvoir être saisies que par l’intelligence, par un acte cognitif. À cet égard, Platon esquisse le mythe de la caverne. À l’intérieur d’une caverne, explique le philosophe, se tiennent des hommes enchaînés, le visage tourné vers le fond sombre, tandis que derrière eux, à l’extérieur de la caverne, brille une lumière.

Entre la lumière et la caverne se trouve un couloir où d’autres hommes tiennent des statues : ceux qui se trouvent à l’intérieur de la caverne voient les ombres des statues projetées par la lumière extérieure sur le sol de la caverne et les prennent pour des objets réels. Si l’un de ces hommes ligotés, poursuit Platon, pouvait sortir de la caverne, il serait d’abord ébloui par la lumière, mais il se rendrait compte ensuite qu’il peut observer les ombres, puis les choses elles-mêmes, et enfin, en tournant les yeux vers le ciel, également le Soleil qui donne forme et consistance aux choses. Dans la philosophie platonicienne, la connaissance repose donc sur quatre étapes : la sensation (les ombres) qui s’adresse à des images sensibles isolées, la croyance (les statues) qui saisit les objets sensibles dans lesquels sont rassemblées les données isolées, la réflexion (le monde réel) qui atteint la connaissance des objets mathématiques, et enfin l’intellect (le soleil) à la lumière duquel les Idées sont reconnues. Avec les deux premiers stades, je n’obtiens que des opinions (doxa), tandis qu’avec les deux autres, j’obtiens des connaissances (épistémè) ; les connaissances admettent donc différents degrés de rigueur et de validité car elles présentent différents degrés de réalité auxquels elles se réfèrent, et le plus haut degré de connaissance est celui auquel correspond le plus haut degré de réalité (connaissance des Idées).

4- Voir A.A. Bailey, Traité sur les Sept Rayons, vol. III, Astrologie ésotérique, ang. 34
5- Série Agni Yoga, Infini I § 301

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